Citoyennes depuis 1915

Citoyennes depuis 1915

Le 19 juin (et non le 8 mars) est la journée nationale de commémoration des droits des femmes en Islande en mémoire de la date historique du 19 juin 1915.

Dès 1882, les Islandaises veuves et indépendantes avaient obtenu le droit de vote aux élections municipales.

rassemblement au square Austurvöllur le 7 juillet 1915

En 1907, ce droit a été étendu à toutes les femmes ; puis, le 19 juin 1915 et malgré l’opposition du roi du Danemark, aux élections parlementaires pour les femmes de plus de 40 ans, qui devenaient également éligibles. En 1920, les restrictions d'âge et de revenus ont été levées, donnant à toutes les femmes islandaises des droits égaux aux élections locales et nationales.

Pour mémoire, les Néo-Zélandaises ont le droit de vote depuis 1893, les Turques depuis 1935, les Françaises depuis 1945….

Ingibjörg H. Bjarnason

Le mouvement islandais pour les suffragettes avait été animé par l'Association des femmes islandaises, fondée en 1894, et l'Association des droits des femmes, créée en 1907 par la fondatrice de Kvennablaðið (« Le Journal des femmes »), Bríet Bjarnhéðinsdóttir. Cette dernière et trois autres suffragettes ont été élue au conseil municipal de Reykjavík en 1908. Elle devint ensuite la première femme à se présenter au parlement en 1916, mais ne fut pas élue. Ingibjörg H. Bjarnason, directrice de Kvennaskólinn (« L’école des femmes ») est devenue la première femme à occuper un siège à Alþingi (parlement) en 1922. Une statue en son honneur se dresse aujourd’hui devant le bâtiment.

Toujours pionnière, en 1980, l’Islande a été le premier pays au monde à élire une femme présidente au suffrage direct. Vigdís Finnbogadóttir, enseignante et directrice d'un théâtre, mère célibataire divorcée, a occupé ce poste 16 ans.

Logiquement, le pays est également en pointe pour l’égalité hommes – femmes (premier au monde devant la Finlande et la Norvège selon le rapport du Forum économique mondial (WEF) de 2017, où la France est 11e sur 144). Les écarts de salaire étaient de 17,5% en 2015 alors que l’égalité salariale est en théorie imposée depuis une loi de 1961. Mais l’écart des salaires est remonté à 21% ces dernières années selon certaines études, et les violences sexuelles et sexistes sont toujours courantes.

L’égalité est donc en vue mais reste un objectif et les Islandaises ne sont pas du genre à se décourager. En 1975, 90 % d’entre elles cessèrent toute activité, au travail comme à la maison, afin de défendre leurs droits. Le 24 octobre 2016, beaucoup quittèrent leur travail à 14 h 38, considérant qu’au-delà de cette heure, elles travaillaient pour rien, comparativement aux salaires hommes. Le 24 octobre 2023, les femmes sont retournées dans la rue et la mobilisation a été exceptionnelle : 100 000 personnes soit le quart de la population, donnant lieu à des images impressionnantes.

La plateforme de revendications présentées à cette occasion va au-delà des seuls droits des femmes et mérite d’être reproduite ici.

  • Nous exigeons la correction de la sous-évaluation du travail dit « des femmes » !
  • Que les employeurs cessent de dévaluer les salaires et les droits des femmes !
  • Nous exigeons des mesures concrètes pour rectifier les conditions des femmes et des hommes les plus pauvres, car personne ne devrait avoir à vivre dans la pauvreté !
  • Nous exigeons l’élimination de l’inégalité salariale et de la discrimination !
  • Que les femmes et les hommes puissent survivre avec leur salaire et avoir la possibilité de s’épanouir dans le monde.
  • Que les femmes et les hommes handicapés aient la possibilité de travailler pour améliorer leurs conditions !
  • Que l’éducation et les compétences des femmes d’origine étrangère soient valorisées !
  • Que les femmes et les hommes ne soient plus financièrement punis pour les soins non rémunérés qu’ils assument tout au long de leur vie et dont ils paient en outre le prix lorsqu’ils atteignent l’âge de la retraite.
  • Que des efforts sociaux soient faits pour éliminer les préjugés à l’égard des personnes handicapées, des personnes queer, des personnes d’origine étrangère et d’autres groupes marginalisés.
  • Nous exigeons que les hommes prennent leurs responsabilités au même titre que les femmes et les genderqueers !
  • Qu'ils assument la responsabilité des devoirs non rémunérés et de la prise en charge des membres de la famille !
  • Qu'ils assument la responsabilité du troisième quart de travail non rémunéré !
  • Nous exigeons que les femmes et les genderqueers ne soient pas placés sous la dépendance financière d'hommes qui en abusent !
  • Que les femmes et les genderqueers obtiennent du soutien pour développer leur indépendance financière après avoir survécu à la violence financière fondée sur le genre !
  • Nous exigeons justice et indemnisation pour les victimes de violences sexuelles et sexistes !
  • Que les auteurs de violences répondent de leurs actes et que la liberté sexuelle soit respectée !
  • Que les femmes et les hommes jouissent de la sécurité et de l’absence de violence et de harcèlement au travail, à la maison et dans les espaces publics !
  • Que la violence fondée sur le genre et la violence sexuelle soient éliminées !
  • Nous exigeons que la politique fasse de nos revendications une priorité !
  • Immédiatement!
  • Nous exigeons de l’action et du changement !
  • MAINTENANT!
Manifestation du 24 octobre 2023

 Sources :

Photos

  • Rassemblement au square Austurvöllur le 7 juillet 1915  : Magnús Ólafsson, collection photographique du Musée national à Reykjavik
  • Statue d'Ingibjörg H. Bjarnason : Fred Cherrygarden.
  • Manifestation 2023 : Eggert Jóhannesson.
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